L’urgence sanitaire, sociale et économique continue, et donc, les mesures financières à destination des secteurs les plus en difficultés aussi : ces mesures méritaient d'être soutenues. Mais certains point du projet de loi expliquent mon abstention finale. Le projet de loi de finances rectificatives 2 vient donc d’être adopté au Sénat.
Sur la forme, comme sur le fond, je me suis opposée à plusieurs dispositions.
9,1% de déficit attendu pour 2020, 115% de dette, 8% de récession. C’est une première, et pour soutenir les investissement publics, notre fiscalité aurait pu être profondément modifiée. Je pense au patrimoine, aux hauts revenus, aux dividendes. Il n’en est rien, le gouvernement a décidé, dès le début du texte, que notre fiscalité ne serait pas modifiée, refusant ainsi d’engager des moyens à hauteur de la crise que nous traversons.
Le gouvernement a par exemple annoncé via ce projet de loi, la mise en place d’une aide de 150 euros pour les plus démunis. Mais ces aides ne sont pas à la hauteur des enjeux! Je considère qu’il faut aller beaucoup plus loin, et mettre en place, par exemple, un moratoire sur les loyers pour les ménages les plus en difficulté, et dans le même temps, que les propriétaires qui remboursent encore un emprunt sur le bien qu’ils ont mis en location puissent eux aussi bénéficier d’un moratoire sur le remboursement de leur dette afin de ne pas les mettre en difficulté. C’est ce que j’ai défendu en séance. Avant cette crise, un grand nombre de nos concitoyens et de nos concitoyennes étaient déjà confrontés à une situation économique très difficile. Parmi les locataires, le taux de pauvreté atteint 35 % en HLM et 23 % dans le parc privé. Il y a bien entendu beaucoup plus de précaires, de personnes en contrats à durée déterminée ou de personnes qui travaillent dans l’économie informelle parmi les locataires que parmi les propriétaires. C’est la raison pour laquelle j’ai pensé qu’il fallait aller beaucoup plus loin qu’une aide de 150 euros. Cela a été rejeté.
Le gouvernement a travers ce projet de loi a annoncé soutenir les entreprises stratégiques à hauteur de 20 milliards d’euros. Et cela, sans contreparties ! Je me suis fortement opposée à cette mesure et ai présenté un amendement qui conditionnait le soutien à des contreparties environnementales. La crise sanitaire actuelle est aussi une crise écologique. Il ne faut pas négliger le rôle majeur joué par le changement climatique et la destruction de la biodiversité dans la propagation de l’épidémie de coronavirus et de celles à venir. Les entreprises que l'Etat propose d'aider face à la crise sanitaire, doivent prendre un chemin compatible avec la préservation de notre environnement. Cet amendement a été rejeté.
Dans la même idée, avec le groupe socialiste, nous avons proposé d’interdire le versement de dividendes aux sociétés ayant bénéficié de la solidarité nationale dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire. Il a été rejeté. J’ai par ailleurs proposé d’interdire aux entreprises qui ont bénéficié du versement anticipé du crédit d’impôt recherche pour 2020 de verser des dividendes la même année. En effet, verser de telles aides aux entreprises, sans condition, en pleine période de crise sanitaire ne me semble pas approprié. Ces propositions ont été rejetées.
J’ai enfin, dénoncé en séance, le double discours du Ministère du Travail qui consiste à dire que l'on veut la santé des salariés coûte que coûte pendant cette crise sanitaire... tout en entravant les contrôles des inspecteurs du travail. J'ai fait référence à la situation ubuesque que vit un Inspecteur du travail dans la Marne, récemment mis à pied... pour avoir fait son travail. Le manque de protection pour les inspecteurs du travail est aberrant. J’ai donc défendu un amendement qui propose de soutenir financièrement les agents du Ministère du travail, en première ligne dans cette crise sanitaire, et qui oeuvrent quotidiennement pour la santé et la sécurité des salariés.
Pour toutes ces raisons, je me suis donc abstenue sur ce texte.